• Bonne semaine à tous !

     

    "Tiens-toi à carreau"

    Où l’on apprend comment se remarier en beauté.

     

    Dans l'ancienne église Sainte-Sophie devenue musée, à Istanbul, une mosaïque fait couler beaucoup d’encre.
    On y voit l’impératrice Zoé et son dernier époux Constantin IX, assis de part et d’autre du Christ. Mais des historiens de l’art remarquent que quelque chose ne tourne pas rond…

    Intérieur du musée Sainte-Sophie, VIe siècle, Istanbul

    En apparence, il n’y a là rien de surprenant. Ces élégants portraits, datant du XIe siècle, correspondent parfaitement à la tradition byzantine : des personnages aux formes simplifiées et un peu raides, sur un fond doré.
    Pourtant, les spécialistes s’aperçoivent que quelqu’un a retouché les visages des souverains Zoé et Constantin ! Quel secret ces portraits peuvent-ils bien cacher ?

    L’empereur Constantin IX Monomaque, le Christ en gloire et l’impératrice Zoé, XIe siècle, mosaïque, Musée Sainte-Sophie, Istanbul

    À l’origine, l’œuvre représentait Zoé aux côtés d’un autre homme ! En effet, l’impératrice n’en est pas à son premier mari. À la place qu’occupe désormais Constantin se tenait vraisemblablement... Romain III, son tout premier mari.

    Quand elle change d’époux, elle doit aussi changer la mosaïque qui le représente. C’est pourquoi, à l’occasion de son dernier mariage, Zoé fait retoucher la figure de l’empereur, afin qu’elle ressemble un peu plus à son conjoint du moment ! Une par une, les tesselles - ces petits carrés de mosaïque - sont retirées pour en mettre de nouvelles.

     

     

    Détails de l’œuvre

    On raconte que l’impératrice ne se serait pas arrêtée en si bon chemin. Zoé, réputée pour son goût des hommes et des jolis vêtements, est un brin coquette.

    Lorsqu’elle fait actualiser le portrait de son mari, elle en profite pour se refaire une beauté. Elle demande donc à ce que l’on modifie son visage. Tout cela dans le but de paraître plus jeune et à la pointe de la mode !

    A voir chez Lady Marianne http://www.ma-chienne-de-vie.com/ tous les samedis "Le tableau du samedi"

     


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    "Merci frangin !"

    Où l'on découvre l'art de mettre les passants en retard.

    Paris, 1872. Sous un splendide ciel bleu, des Parisiens flânent sur le Pont Neuf. Le peintre Renoir, posté à l’étage d’un café, tente de fixer la scène sur sa toile. Pour l’architecture, pas de problème, elle ne bouge pas.
    Mais les passants, eux, ne prennent pas la pose… Comment alors représenter cette foule en mouvement ?

    Pierre-Auguste Renoir, Pont Neuf, Paris, 1872, huile sur toile, 75 x 93 cm, National Gallery of Art, Washington

    Pas besoin d’appareil photo, la stratégie est toute trouvée : Renoir peut compter sur son petit frère Edmond.
    Ce dernier racontera l’épisode, quelques années plus tard : à la demande de son frère, le bel Edmond se promène sur le Pont Neuf et arrête les passants, discute avec eux ou leur demande l’heure…

    Tous les prétextes sont bons pour laisser le temps au peintre de les immortaliser ! Renoir, à l’affût, dispose alors de quelques secondes pour esquisser leurs silhouettes sur la toile.

    Pierre-Auguste Renoir, Couple lisant (Edmond Renoir et Marguerite Legrand), 1877, huile sur toile, collection privée

    Comme de nombreux peintres impressionnistes, Renoir cherche en effet à peindre l’instant. Ici, il parvient à rendre l’animation qui règne sur le Pont Neuf, baigné dans la chaude lumière de la mi-journée.

    Marchandes de fleurs, conducteurs de fiacres, élégantes avec leur ombrelle… Tous sont saisis en quelques touches de pinceau, immortalisés dans leurs activités quotidiennes.

    Détail de l’œuvre

    En observant de plus près cette foule, on reconnaît aussi la silhouette élégante d’Edmond avec son chapeau jaune et sa canne. Le peintre a même représenté deux fois son frère dans la toile !

    C’est pourquoi, si un monsieur vient vous faire un brin de causette dans la rue, prenez votre meilleure pose : le peintre n’est peut-être pas très loin...

    Détails de l’œuvre

    Dans l'article le tableau du samedi chez Lady Marianne http://www.ma-chienne-de-vie.com/


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    "Arrête tes singeries !"

    Où l’on fait la connaissance d’un prince avec le sens de l’humour.

    1737, au château de Chantilly. Les visiteurs désirant voir le maître des lieux, le duc de Bourbon, prince de Condé, doivent attendre dans une petite pièce.
    Appelé antichambre, l’endroit est richement décoré : des singes aux tenues colorées y servent des êtres humains. En prêtant attention aux détails, les visiteurs ont de quoi sourire…

    La Grande Singerie, 1737, Château de Chantilly

    En effet, le prince a beaucoup d’autodérision. Un des singes porte ses habits et son drapeau : une vraie caricature !

    Au XVIIIe siècle, le singe est fréquemment utilisé dans la peinture pour se moquer des humains. Et il semblerait que le prince s’en accommode fort bien.

    Christophe Huet, Grande Singerie : porte donnant sur le Cabinet d’angle, 1737, Château de Chantilly

    Il n’est pas tout seul. Plusieurs petits singes portent également des uniformes aux couleurs de la maison de Condé, joliment baptisées "ventre de biche et amarante", soit jaune et rouge.
    Tous sont occupés à chasser du gibier : encore un clin d’œil au maître des lieux, dont la principale occupation est la chasse à courre.

    Christophe Huet, Décor de la Grande Singerie, 1737, Château de Chantilly

    Dans cette autre scène, un Turc observe un vase d’un air satisfait. Qui est-il ? À nouveau, il s’agit d’un portrait déguisé du prince ! Le décor met cette fois en avant son amour des beaux objets d’art.

    Les petits singes qui l’entourent sont bien occupés. L’un des deux, par exemple, peint une céramique : c’est une allusion directe à la création par le prince de sa propre manufacture de porcelaine à Chantilly.

    Christophe Huet, Décor de la Grande Singerie : Allégorie de l'Afrique du Nord, 1737, Château de Chantilly

    Si le prince n’est pas susceptible, les femmes de sa famille non plus.

    Le château de Chantilly possède un autre décor de ce type, appelé "singerie", où les dames sont représentées sous les traits… de chics guenons !

    Christophe Huet, Décor de la Petite Singerie : Dame à sa toilette, 1737, Château de Chantilly

     

     

     
     

     


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  • "Ras-le-bol des critiques"

    Où l'on découvre des jeunes femmes pas assez gracieuses.

     

    1763, Paris. Sous les yeux de ses assistants ébahis, Carle Van Loo, premier peintre du roi, détruit son propre tableau ! Armé d'un couteau à mélanger les couleurs, il aurait lacéré sa toile.
    Elle représente trois jeunes femmes nues s'offrant au regard du spectateur. Mais pourquoi tant d'acharnement à les faire disparaître ?

    Van Loo revient alors du Salon du Louvre, où il a présenté Les Trois Grâces. Il est traditionnel de représenter ces trois divinités seulement vêtues d'un voile transparent. Elles symbolisent la séduction, la beauté et la fécondité. Le sujet n'était donc pas très risqué !

    Carle Van Loo, Esquisse préparatoire pour Les Trois Grâces, vers 1763, huile sur toile, 58 x 46 cm, Los Angeles County Museum of Art, Los Angeles

    Mais il avait oublié un détail... Depuis le début du XVIIIe siècle, le public vient au Salon pour le plaisir de critiquer les œuvres qui s'y trouvent. Et il s'acharne contre le pauvre Van Loo !

    Les visiteurs trouvent que son tableau manque de dynamisme et de naturel, que les têtes des Grâces sont trop communes... La maîtresse du roi, elle-même, Madame de Pompadour, s'exclame avec dédain devant le tableau : "Ça, des Grâces ?"

    Carle Van Loo, Esquisse préparatoire pour Les Trois Grâces, vers 1763, huile sur toile, 58 x 46 cm, Los Angeles County Museum of Art, Los Angeles. Détail de l’œuvre

    Or Van Loo est obsédé par la perfection. Vexé et humilié, il retire son tableau de l'exposition et le détruit. Puisque c'est ainsi, il va tout reprendre !
    Pendant deux ans, il peint de nouveau le même sujet jusqu'à... en mourir. Selon le philosophe Diderot : "Ces Grâces ont accéléré sa fin."

    Dommage, car la nouvelle version du tableau est accueillie avec bien plus d'indulgence au Salon de 1765 !

    Carle Van Loo, Les Trois Grâces, deuxième version de 1765, huile sur toile, Château de Chenonceau


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